Le droit des sociétés fait partie des droits-piliers d’un pays, dans la mesure où il sert de vecteur à son économie, de thermomètre à son climat des affaires et de béquille à son secteur social. En fait, par son droit des sociétés, un État peut mettre en place des mécanismes appropriés pour relever et soutenir son économie ainsi qu’élever le niveau de vie de sa population.

Cette législation porte notamment sur les règles régissant la création, l’organisation, la dissolution mais surtout le fonctionnement des sociétés commerciales. Elle définit en particulier de quelle manière celle-ci peut interagir dans le monde juridique, en l’occurrence comment elle peut agir en justice en demande ou en défense.

A ce sujet, c'est depuis le 13 juillet 2012 que la République Démocratique du Congo a adhéré à l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, en sigle OHADA, de sorte que son droit des sociétés est à ce jour régi par l’Acte uniforme sur le droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, AUSCGIE en sigle, tel que révisé à Ouagadougou le 30/janvier 2014.

Il est intéressant d’observer de quelle manière, les sociétés congolaises soumises à l’ancienne législation ont pu migrer et s’adapter à cette nouvelle législation. C’est ainsi que mon intervention porte sur la représentation des sociétés commerciales harmonisées au droit OHADA et ce avec un accent, particulier sur leur représentation en justice.

La société commerciale étant une personne morale, elle est appelée à poser des actes dans ses rapports avec les associés ou actionnaires mais aussi dans ses rapports avec les personnes tierces,. Pour ce faire, elle doit être représentée par l’organe habilité par la loi et qui selon la forme de société choisie peut être par une personne physique habilitée ou une personne morale. Au-delà de ce qui précède, la représentation d’une société postule soulève des questions distinctes selon qu’il s’agit de ses activités ou des actions en justice. C’est ce dernier aspect de la représentation qui fait l’objet du présent exposé.

A cet effet, il est question de savoir d’une part qui a qualité à représenter une société en justice et d’autre part, dans quelle mesure un avocat est réputé avoir reçu mandat spécial exigé par le règlement de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage. Le sujet revêt un intérêt particulier tant en raison des innovations introduites par l’AUSCGIE par droit antérieur congolais, que de la nouveauté du pourvoi en cassation de la CCJA pour les sociétés commerciales exerçant des activités en RDC1. Il n’est donc pas surprenant que la CCJA ait eu à se prononcer à plusieurs fois sur la légalité du mandat de représentation de l’avocat dans les litiges impliquant des sociétés congolaises. Dans ce sens, une bonne intelligence de la jurisprudence CCJA (III), postule au préalable de s’arrêter sur les dispositions de l’AUSCGIE en matière de la représentation des sociétés commerciales (I), ainsi que l’encadrement du mandat spécial requis de l’avocat aux fins de pourvoi devant la haute Cour de l’OHADA (II).

 

I Les organes de représentation des sociétés commerciales

 

Tout d’abord, il y a lieu de rappeler que la représentation est un procédé juridique par lequel une personne, appelée représentant, agit au nom et pour le compte d’une autre personne, appelée représenté ou le fait de représenter ou le fait d’agir en lieu et place d’une autre personne.

Globalement les articles 121 et 122 de l’AUSCGIE posent le principe de représentation et précisent les organes de gestion, d’administration et de direction qui sont ceux les représentants légaux des sociétés commerciales et cela dépendra d’une forme de Société commerciale à une autre.

L’article 121 de l’AUSCGIE dispose : « A l’égard des tiers, les organes de gestion de direction et d’administration ont dans les limites fixées par le présent Acte Uniforme pour chaque type de société, tout pouvoir pour engager la société, sans avoir à justifier d’un mandat spécial. Toute limitation de leurs pouvoirs légaux par les statuts est inopposable aux tiers de bonne foi ».

C’est sur base de ces dispositions légales que les organes de gestion, d'administration ou de direction selon qu'il s'agit d'une forme de société à une autre, représentent légalement la société en justice.

 

1. Société en nom collectif

L’article 276 de l'AUSCGIE dispose que « les statuts organisent la gérance de la société. Ils peuvent désigner un ou plusieurs gérants associés ou non, personnes physiques ou morales ou en prévoir la désignation dans un acte. Si une personne morale est gérante, ses dirigeants sont soumis aux mêmes conditions et obligations et encourent les mêmes responsabilités civiles et pénales comme s’ils étaient gérants en leur propre nom, sans préjudice de la personne morale qu’ils dirigent. A défaut d’organisation de la gérance par les statuts, tous les associés sont réputés être gérants. ». Il résulte de ce qui précède que le gérant est le mandataire légal d’une société en nom en collectif.

2. Société en commandite simple (SCS)

En matière de représentation de la SCS, la base légale spécifique est l’article 298 de l’AUSCGIE qui dispose : « La société en commandite simple est gérée par tous les associés commandités sauf clauses contraires des statuts qui peuvent désigner un ou plusieurs gérants, parmi les associés commandités ou en prévoir la désignation par un acte ultérieur, dans les mêmes conditions et avec les mêmes pouvoirs que dans une société en nom collectif ».

Choisi parmi les associés commandités, c’est le gérant qui est habilité à représenter légalement une société en commandite simple.

3. La société à responsabilité limitée (SARL)

L’article 323 de l’AUSCGIE dispose que : « la société à responsabilité limitée est gérée par une ou plusieurs personnes physiques, associées ou non ». Il découle de cette disposition que le gérant est une personne physique, sachant qu’en cas de pluralité de gérants chacun d’eux a tous les pouvoirs pour poser les actes pour compte de la SARL.

Quant au mandat spécial que doit obligatoirement obtenir un avocat conformément à l’article 23 alinéa 1er du règlement de procédure devant la CCJA pour compte d’une société à responsabilité limitée. L’avocat ne devra l’obtenir que du gérant de la société ou de l’un des gérants au cas où il y en aurait plusieurs.

4. La société Anonyme

Le mode d’administration de la société dont le choix est fait dans les statuts varie selon qu’il s’agit d’une société Anonyme avec Conseil d’administration ou d’une société Anonyme avec administrateur général. Article 414 de l’AUSCGIE.

Toute société Anonyme qui compte plus de trois administrateurs doit être dotée d’un conseil d’administration conformément à l’article 494 de l’AUSCGIE qui dispose que « les sociétés anonymes comprenant un nombre d’actionnaires supérieurs à trois doivent avoir un conseil d’administration. ».

  • Le représentant légal d'une société anonyme avec un Conseil d'administration

A ce niveau, nous avons soit :

• Le Président Directeur Général est un administrateur personne physique, il est investi des pouvoirs les plus étendues, il engage la société même par les actes qui sortent de l’objet social conformément à l’article 122 et 465 de l’AUSCGIE, il assure la direction générale de la société qu’il représente dans ses rapports avec les tiers, il peut être assisté d’un ou plusieurs Présidents Directeurs Généraux adjoints, nommés à son initiative par le Conseil d’Administration. C’est lui qui représente légalement la société. Ici il s’agit d »’un président du conseil d’administration qui assume en même temps les fonctions de directeur général.

Soit encore le Conseil d’administration nomme le Directeur général,

Le Directeur général : c’est une personne nommée par le Conseil d’administration parmi ses membres ou en dehors de ceux-ci, il peut être assisté d’un ou plusieurs Directeurs généraux adjoints nommés sur sa proposition par le Conseil d’Administration. Et il a le droit de déléguer son pouvoir à un adjoint, qui est Directeur général adjoint et cela doit être prouvé par un acte.

Lorsqu’à la création d’une société anonyme, le nombre d’administrateurs est inférieur ou égal à trois, la société anonyme qui sera créé c’est celle avec administrateur général.

Représentation de la Société anonyme avec Administrateur directeur général

Il s’agit de la société qui se dote simplement d’un Administrateur général, personne physique ou morale actionnaire ou non, qui assume sous sa responsabilité, les fonctions d’administration et de direction de la société (article 494AUSCGIE)..

Représentant Légal

Administrateur directeur général : il est investi des pouvoirs les plus étendus qu’il exerce dans la limite de l’objet social. Il engage la société dans tous ses actes, même ceux qui ne relèvent pas de l’objet social (article 122 et 498 de l’AUSCGIE. Il est assisté par un Administrateur général adjoint, nommé par le conseil d’administration sur proposition de l’Administrateur général).

5. Société par actions Simplifiées (SAS)

Les statuts déterminent les conditions et les modalités d’administration et de direction de la SAS. Elle est légalement représentée par un Président qui pourrait être une personne physique ou morale. Il est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société. (Art. 122 et 853-8 AUSCGIE). Les statuts peuvent prévoir la nomination d’un Directeur général ou d’un Directeur général adjoint pouvant exercer les pouvoirs confiés au Président. De tout ceci, il est important de préciser que les limitations des pouvoirs confiés aux mandataires sociaux ne sont pas opposables aux tiers.

Il est important de préciser que, quelque soit la forme de la société, en cas de crise ou de difficulté de gestion, l’article 160.1 de l’AUSCGIE dispose que lorsque le fonctionnement normal de la société est rendu impossible, soit du fait des organes de gestion, de direction ou d’administration, soit du fait des associés, la juridiction compétente statuant à bref délai, peut décider de nommer un administrateur provisoire aux fins d’assurer momentanément la gestion des affaires sociales.

En cette période la personne habilitée à représenter la société c’est l’administrateur provisoire. Et en cas de liquidation de la société ou des biens, seul le liquidateur est habilité à représenter légalement la société.

 

 

Par Maitre KAJ WA NDAY Arlette et disponible en version pdf

 

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